Une semaine en Haïti N° 1631 et autres nouvelles

(actualisé le ) par Gérard

Une très bonne année à toutes les personnes qui apportent leur aide aux enfants d’Haïti à travers notre association.
Toute une génération d’enfants souffre des conséquences de cette guerre intérieure permanente que représentent la corruption à tous les niveaux, la violence quotidienne, l’incertitude de l’avenir, les maladies, la faim.
Faire un peu est toujours mieux que ne rien faire, mais nous sommes tristes devant cette situation qui semble désespérée.

Pour lire les nouvelles d’Haïti par le Collectif Haïti de France, cliquez sur le lien ci-dessous : Une semaine en Haïti

Avant tout, la dernière lettre de notre directrice de l’école de Verrettes, Wista Cerfrère. Cliquez ici

Il est très important de pouvoir, malgré la situation, offrir quelques instants de fête aux enfants. Personne ne sait ce que sera l’avenir ; il est déjà bien compromis par la souffrance qu’ils subissent quotidiennement et la violence qui les entoure.
Comme Wista nous le dit dans la lettre, les enfants ont accès à une bouteille de lait chaque matin, grâce à l’aide de l’Ambassade de France et à l’association partenaire "Lait a gogo" qui récolte le lait auprès des paysans, le stérilise et le conditionne.

QUELQUES ARTICLES
Insécurité et instabilité politique  : les défis économiques qui hantent Haïti en 2023

Dans un contexte national marqué par l’instabilité sociopolitique, l’aggravation du phénomène de l’insécurité et l’exode massif de la population à la recherche d’une vie meilleure, l’économie haïtienne, comme on pouvait s’y attendre, n’a pas pu rebondir au cours de l’exercice fiscal 2022-2023.
Par Jean Junior Celestin (le nouvelliste)
03 janv.
Dans un contexte national marqué par l’instabilité sociopolitique, l’aggravation du phénomène de l’insécurité et l’exode massif de la population à la recherche d’une vie meilleure, l’économie haïtienne, comme on pouvait s’y attendre, n’a pas pu rebondir au cours de l’exercice fiscal 2022-2023. Elle s’est enfoncée davantage dans la récession pour la cinquième année consécutive. « Le Produit intérieur brut (PIB), qui avait déjà diminué de 1,7% en 2022, a atteint 592,7 milliards de gourdes en valeur constante ( 4 milliards 228 millions d’€), au cours de l’année fiscale 2023, contre 604,0 milliards en 2022, accusant ainsi une nouvelle baisse de 1,9% en volume », a indiqué l’Institut haïtien de statistique et d’informatique ( IHSI) dans son rapport sur les « comptes économiques en 2023 »
Au-delà des contraintes structurelles, plusieurs facteurs négatifs ont contribué au déclin des activités économiques dans le pays en 2023. Notamment l’accentuation de la crise sécuritaire, attribuable principalement à la prolifération continue des gangs armés. Des groupes civils armés se sont multipliés dans tout le pays au cours de l’année fiscale 2023, occupant davantage d’espaces pour mener leurs activités criminelles au détriment des agents économiques et de l’ensemble de la population. Concentrés principalement dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, les bandits installent des postes de rançonnage sur les principaux axes routiers reliant la capitale économique au reste du pays.
Selon ce que rappelle l’IHSI, diverses régions, dont Carrefour-Feuilles, plusieurs quartiers de la plaine du Cul-de- Sac, le prolongement de la nationale #1, de Canaan jusqu’aux confins de Source Matelas, la nationale #2, incluant Martissant et Fontamara, le tronçon de Morne-à-Cabri menant vers le bas Plateau central, le bas Artibonite, la principale région rizicole du pays, ont été envahies par les gangs armés. En 2023, l’insécurité a provoqué des déplacements massifs et désordonnés des riverains, aggravant les conditions de vie déjà précaires de la population. Ainsi, « pour une nouvelle année consécutive, le phénomène de l’insécurité est resté l’un des principaux obstacles pesant sur l’économie haïtienne », a déclaré l’économiste Thomas Lalime, intervenant à la matinale de Magik 9 le mercredi 3 janvier 2024.
Selon le Dr Lalime, tant que la question de l’insécurité ne sera pas résolue, d’autres problèmes économiques, tels que la reprise de la croissance, et les promesses du Premier ministre resteront des vœux pieux.
« L’une des réponses les plus simples aux problèmes économiques d’Haïti est d’améliorer les conditions de sécurité », a suggéré l’économiste, insistant sur le fait que toute solution économique doit passer par le rétablissement de l’ordre et de la sécurité publique, pour permettre la libre circulation des personnes et des biens sur le territoire national.
Le Dr Lalime a souligné la nécessité d’un taux de croissance supérieur à 2% pour les cinq prochaines années. « Avec un taux inférieur à 2%, d’ici 2023, Haïti n’atteindra même pas le Produit intérieur brut qu’elle avait en 2018. Il a fallu dix-huit ans pour se remettre des trois années de concentration économique pendant la période d’embargo de 1991. Combien de temps faudra-t-il pour se remettre des cinq dernières années de récession économique ? », s’est-il demandé à l’émission Panel Magik.
Un autre facteur contribuant au déclin économique en 2023, selon l’économiste Lalime, était la persistance de l’instabilité politique. « La crise sociopolitique, en cours, a également joué un rôle dans l’atterrissage "violent" que l’économie a connu en 2023, avec en toile de fond une nouvelle contraction du PIB et la persistance d’une inflation à deux chiffres », a avancé l’économiste.
Invité à Magik9 le mercredi 20 décembre 2023, l’économiste Kesner Pharel a analysé les principaux indicateurs économiques de l’année 2023. Au cœur de son argumentation, M. Pharel a mis en lumière le rôle central de la sécurité dans la croissance économique du pays. « L’insécurité a un impact dévastateur sur le développement économique d’Haïti », a-t-il soutenu.
Les constats de l’impact de l’insécurité ne sont pas uniquement des éléments conjoncturels, mais ils dessinent une tendance qui pourrait bien devenir structurelle, selon l’économiste. « Les cinq dernières années de récession économique ne sont pas exclusivement imputables aux problèmes liés au secteur agricole ou industriel. L’insécurité, cette variable qu’on peut avoir tendance à négliger, est en passe de devenir un problème structurel. Sans la sécurité, la défense, on ne peut avoir de croissance économique », a-t-il déclaré.

Thomazeau abandonnée par la direction départementale Ouest 2 de la PNH

Thomazeau est une jolie commune au bord du lac saumâtre, à une trentaine de Km de Port au Prince. Nous y avions créé, avec SOS Enfants une grande zone de pisciculture (élevage de tilapias). Aujourd’hui, la zone, comme beaucoup d’autres en Haïti, est sous la coupe des gangs et une part de la population a dû fuir pour sauver sa vie. Commerces et routes fermées, maisons brûlées, tout est arrêté.
Par Par Jean Junior Celestin
22 déc. 2023 Le Nouvelliste
Depuis l’attaque armée des bandits du gang 400 Mawozo contre le commissariat de la commune de Thomazeau (Nord-Est de Port-au-Prince ) le mercredi 4 octobre 2023, les activités sont à l’arrêt. Les écoles, des entreprises privées, des institutions publiques sont fermées. Josette Cyprien, présidente de la commission municipale de la commune, estime que la ville est abandonnée par la direction départementale Ouest 2 de la PNH.
La présidente de la commission municipale de la commune de Thomazeau est revenue sur ce qu’est devenue la ville après les attaques des bandits du gang 400 Mawozo. Sur Magik 9, le vendredi 22 décembre 2023, Josette Cyprien a déploré l’absence d’intervention policière dans la commune.
« Jusqu’à présent, de nombreuses personnes sont contraintes de fuir leur lieu de résidence pour se mettre à l’abri d’autres éventuelles attaques de cette bande de criminels. Ils sont éparpillés à Mirebalais, Saut-d’Eau, Cornillon et Lascahobas. On attend une intervention de la police pour permettre à la population de retourner chez elle », a fait savoir la mairesse, révélant qu’elle a une population de plus de quatre-vingt mille habitants. « Une bonne partie de cette population ne peut pas se déplacer pour diverses raisons. Elle a deux points de résistance près du lac, mais on a besoin de la présence de la PNH », a-t-elle déclaré.
La présidente de la commission municipale de la commune de Thomazeau est revenue sur ce qu’est devenue la ville après les attaques des bandits du gang 400 Mawozo.
« Malgré les nombreux appels de détresse, il n’y a jamais eu de renfort de la PNH. On en avait par le passé. À un certain moment, il n’y avait que trois policiers dans le commissariat. Malgré nos démarches auprès du haut commandement de la PNH, rien n’a été fait », a-t-elle révélé à l’émission Panel Magik.
« On ne sait pas pourquoi le nouveau directeur départemental Ouest 2 de la PNH nous laisse seuls dans cette bataille. Le nouveau directeur m’a informé d’un plan d’intervention pour Thomazeau, mais jusqu’à ce jour rien n’est fait. Je me demande si la DDO 2 a un problème avec la commune ou avec moi personnellement. Il nous a abandonnés. On ne demande pas plus qu’une intervention de la police pour déloger les bandits », a clamé la mairesse.
Selon ce qu’a rapporté la mairesse Josette Cyprien, depuis deux ans, il y a eu plusieurs tentatives des bandits de 400 Mawozo d’envahir la commune de Thomazeau, « mais grâce à la vigilance et la détérioration de l’inspecteur de police Kemps Dorélien, on a tenu bon. Après les attaques du mois d’avril, il y a eu beaucoup de déplacés et un ralentissement des activités à tous les niveaux. Avec les efforts de la police, la vie a vite repris. Il y a eu la réouverture des classes, l’organisation des examens officiels, la fête patronale, les championnats de vacances », a-t-elle indiqué.
« Au début du mois d’octobre, en pleine ouverture de l’année scolaire, la situation a dégénéré. Des bandits du gang 400 Mawozo ont une nouvelle fois attaqué la ville et ont mis le feu au commissariat de Thomazeau le mercredi 4 octobre. Depuis, Thomazeau a l’allure d’une ville fantôme », s’est lamentée la mairesse, révélant que dans la nuit du 18 octobre, le greffe du tribunal de première instance a été cambriolé.
Le vendredi 17 novembre 2023, des bandits armés du gang 400 Mawozo ont tué cinq personnes, blessé deux autres et incendié plusieurs maisons, dont celle de l’ancien député Price Cyprien lors d’une nouvelle attaque armée dans la commune de Thomazeau.
Selon Josette Cyprien, des dispositions ont été prises pour empêcher les bandits d’envahir la commune. Mais le départ à la retraite de l’inspecteur de police Kemps Dorélien a tout changé. « Depuis mon arrivée en novembre 2020, on a pris toutes les dispositions pour assurer la sécurité dans la ville. L’inspecteur Kemps Dorélien est malheureusement parti à la retraite. Le nouveau responsable du commissariat est absent de son poste pendant deux mois. Les policiers sont seuls, le commissariat est vulnérable, la ville est livrée aux bandits », regrette Josette Cyprien.

3,8 milliards de dollars de transferts en 2023, Haïti survit grâce à sa diaspora

PIB d’Haïti : « 20 milliards de dollars Us, soit 1660 US par habitant par an)
C’est une moyenne, ce qui ne veut pas dire que chaque personne dispose de cette somme…c’est tout ce qui est produit par la nation en une année…mais cela permet de comparer ce qu’est la « richesse d’un pays ». Les associations comme la nôtre sont comptées dans la dispora…
Martinique : 29400 Us par habitant par an.
Les transferts des travailleurs haïtiens à l’étranger ayant totalisé 3,8 milliards de dollars en 2023, en dépit d’un léger décru de 1,2 % par rapport à 2022, ont « fourni une bouffée d’oxygène aux ménages », a estimé l’Institut haïtien de statistique et d’informatique (IHSI) en ce qui concerne « la consommation finale » dans son rapport sur les comptes économiques en 2023.
Par Roberson Alphonse. Le nouvelliste
03 janv.
Les transferts des travailleurs haïtiens à l’étranger ayant totalisé 3,8 milliards de dollars en 2023, en dépit d’un léger décru de 1,2 % par rapport à 2022, ont « fourni une bouffée d’oxygène aux ménages », a estimé l’Institut haïtien de statistique et d’informatique (IHSI) en ce qui concerne « la consommation finale » dans son rapport sur les comptes économiques en 2023.
« … Par rapport à l’année dernière, les envois de fonds des travailleurs haïtiens à l’étranger ont légèrement décru (1,2%) en 2023, contre une chute (4,9%) relativement plus substantielle en 2022. On peut ainsi penser que les 3,8 milliards de dollars américains de cette année ont quand même fourni une bouffée d’oxygène aux ménages », peut-on lire dans ce rapport qui a également considéré « l’apport des flux financiers de plusieurs milliards de gourdes inscrits dans le cadre du Programme d’Urgence Multisectoriel d’Apaisement et de Réinsertion Sociale des Groupes vulnérables ».
L’économiste Etzer Emile, interrogé par Le Nouvelliste, a indiqué que « depuis l’adoption des nouveaux calculs de détermination du PIB, le poids des transferts de la diaspora est désormais en dessous des 20% du revenu national. » « Toutefois, ils restent aussi importants pour assurer totalement ou en partie le pouvoir d’achat de près de la moitié des ménages du pays, qui doivent se nourrir, payer le loyer, le transport et financer la scolarité des enfants. L’importance est d’autant plus capitale dans un contexte d’accélération du chômage dû au ralentissement considérable des activités des entreprises dans une économie en pleine récession qui vient de connaître sa cinquième année de croissance négative », a dit Etzer Emile, qui a souligné que la dépendance d’Haïti transferts de sa diaspora n’est pas un compliment. « Haïti fait partie des pays du monde les plus dépendants des transferts de la diaspora, et ce n’est pas un compliment, car cela est signe d’une économie moribonde, non dynamique, non diversifiée qui est incapable de générer de par elle-même de la richesse et des revenus pour les citoyens. Les transferts tels qu’ils sont ne font que financer les importations et assurer la survie des familles bénéficiaires sans grande retombée sur la croissance et l’emploi », a-t-il indiqué.
Pour l’économiste Etzer Emile, « il faudra aller au-delà des transferts et insérer ces derniers dans une nouvelle dynamique, dans un autre modèle de coopération plus globale, plus intelligente et plus productive avec les Haïtiens vivant à l’étranger. »
« Les 3.8 milliards de dollars américains représentent environ 20% du PIB considéré aux prix courants. Les transferts privés sans contrepartie en provenance de la diaspora sont une mesure généralement considérée pour effectivement apprécier l’importance des transferts au niveau macroéconomique. Le ratio explique la dépendance d’un pays aux transferts. En 2022, les données de la Banque mondiale ont indiqué qu’Haïti était le troisième pays en Amérique latine et la Caraïbe le plus dépendant des transferts de la diaspora après le Salvador et les Honduras.Au niveau mondial, Haïti est parmi les pays où le ratio transferts sur PIB est le plus élevé. Avec plus de 3,8 milliards de dollars de transferts, Haïti reste en 2023 très dépendant des fonds de la diaspora », a confié à Le Nouvelliste l’économiste Enomy Germain. « En outre, a-t-il poursuivi, la diaspora constituait en 2023 la source la plus importante de devises pour le pays. Elle fournit au pays quatre fois plus de ressources que celles provenant des exportations (moins d’un milliard) et près de 100 fois plus de ressources que celles reçues par le pays à travers les investissements directs étrangers (39 millions en 2022). Les transferts de la diaspora sont généralement utilisés pour satisfaire les besoins de consommation alimentaire des ménages en Haïti.
Dans une étude de PROECO HAITI en 2023, il est estimé que près de 60% des montants reçus sont utilisés pour la fonction de consommation. Sans ces ressources, une part plus importante de la population serait donc dans la faim totale. En outre, les transferts de la diaspora aident à alimenter le marché en dollars américains. En leur absence, le taux de change de la gourde par rapport au dollar américain serait sans doute plus élevé », a dit Enomy Germain, qui croit que le pays doit diversifier ses sources de devises.
« C’est une dépendance trop importante du pays par rapport au reste du monde. Cela rend le pays vulnérable aux chocs externes. Tout choc dans les pays d’accueil des membres de la diaspora haïtienne impacte l’économie en Haïti. Le pays doit diversifier ses sources de devises. Certains pays parlent aujourd’hui de résilience aux transferts. Comme pays dans un monde instable et imprévisible, Haïti doit emboiter le pas aux autres », a dit Enomy Germain. Si l’on s’en tient à ces 35 dernières années, le pays a connu des vagues migratoires successives provoquées par la violence politique, les coups d’État, les catastrophes naturelles et la violence des bandes armées. Certains estiment autour de 10 % le nombre d’Haïtiens vivant à l’étranger.
« Haïti connaît depuis longtemps une émigration importante, et le nombre d’Haïtiens qui vivent à l’étranger ne cesse d’augmenter : 1.2 million en 2015 d’après les estimations, principalement aux États-Unis. Par ses envois de fonds – qui constituent environ 25 % du produit intérieur brut (PIB) haïtien – la diaspora peut contribuer au développement du pays. L’un des principaux défis pour Haïti est de parvenir à mieux gérer les migrations de sa population et de les mettre davantage au service du développement, alors même que les données et les analyses empiriques consacrées à cette problématique sont encore peu nombreuses », peut-on lire dans le chapitre « Paysage de la migration en Haïti » d’un rapport de l’OCDE.

Voir en ligne : Une semaine en Haïti N° 1631