Une semaine en Haïti N°1635 31 Janvier 2024

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Ci-dessous,
Haïti au jour le jour...

Des nouvelles tirées du quotidien Haïtien "Le nouvelliste".

Haïti au jour le jour.
Haïti poursuit tranquillement sa descente vers l’abîme. Les bandits armés se montrent de plus en plus efficaces dans leur mission de semer le deuil, la souffrance et le désespoir.
La population de Pernier en a fait l’expérience le mardi 30 janvier 2024. Les images de vieillards, de femmes enceintes, d’enfants en bas âge, de pères et mères de famille désespérés fuyant, sans savoir où aller, la cruauté des gangs donnent froid dans le dos.
Les images, dans la même journée de mardi, des bandits ayant pris d’assaut la prison civile des femmes à Cabaret renforcent l’image apocalyptique qu’offre le pays.

Cap Haïtien suffoque sous le poids des ordures et des pollutions.

À l’entrée de la ville, dans les parages de l’aéroport international, les déchets se donnent en spectacle. N’ayant pas été enlevés depuis trop longtemps, ils s’amoncèlent et occupent même les canaux, empêchant ainsi l’eau de s’écouler jusqu’à la mer. Ce sont des émanations insupportables qui se dégagent à l’entrée d’une ville considérée comme la principale destination touristique du pays. Qui peut lui venir au secours ?
L’on traverse la rue en allant vers l’ouest, la situation n’est guère différente, ceci, malgré le fait qu’il s’agit d’un littoral. Cette partie de la côte constitue l’un des plus longs sites de décharge du pays. C’est environ trois kilomètres de déchets en continu. On y retrouve toutes sortes d’immondices. Mêmes les vidangeurs s’y donnent à cœur joie dans cet espace où pullulent laveurs d’autos, mécaniciens, constructeurs et réparateurs de pirogues et de barques de fortune.
Le sous-commissariat de cette zone ne fait pas peur aux pollueurs. Pour les habitants de Fort Saint-Michel, le bord de mer est un centre de décharge qui ne dit pas son nom. C’est peut-être le plus long du pays. La plus belle décharge à ciel ouvert et les pieds dans l’eau. Tout se fait au grand jour. Ni les autorités, ni les citoyens conscientisés de la situation pour empêcher une telle violence. Personne ne se montre préoccupé par l’ampleur de la situation. La mairie est aux abonnés absents. Le ministère de l’Environnement, à travers le Service national de gestion des résidus solides (SNGRS), aussi.
C’est le même tableau en s’approchant un peu plus du centre-ville. Le marché dans les parages de la gare routière de Shada expose encore plus la situation. Rien de sain. Les marchandises se confondent avec les immondices. Des centaines de gens : marchands, acheteurs et passants assistent à ce spectacle immonde à longueur de journée sans mot dire.
Cette partie de la ville interpelle depuis plusieurs années. Les autorités au plus haut niveau de l’État se disent déterminés à améliorer l’aspect physique de la ville. Les mares boueuses et les flaques d’eau ont disparu dans cette partie de la ville avec la construction en cours de la route. Des bâtisses ont été rayées pour donner un coup de pinceau au bord de mer. Mais une décennie plus tard, ce n’est pas encore le cas. La laideur change seulement d’espace.
Mais il ne s’agit pas seulement de cette partie de la ville. C’est le Cap-Haïtien en entier qui mérite d’être soulagé. En empruntant la route nationale numéro 1, du centre-ville jusqu’à Vaudreuil, à chaque cent mètres, une tonne d’immondices s’accumulent. Si la mairie n’est pas assez équipée pour répondre à cette mission qui est le nettoyage des rues, la population n’aide pas non plus. L’amour de la ville exprimé par une partie importante de la population capoise n’est qu’une phrase vide de sens dans la mesure où elle n’est pas traduite par des actions concrètes.
La ville fait face à un problème certain de gestion des déchets et cette situation ne date pas d’hier. Les mesures et les décisions prises par les autorités locales et centrales pleuvent mais n’apportent toujours pas les résultats escomptés. La situation s’aggrave de plus en plus. Et la ville en meurt. Elle est sur le point d’être asphyxiée. Mais qui va l’aider à reprendre son souffle ? Peut-être qu’il lui faut une bonne oxygénothérapie. Pour cela, il faut commencer par libérer ses voies en dégageant les immondices qui s’amoncèlent un peu partout dans la ville.
L’ONA dénonce le pillage et l’incendie de son bureau communal à Ouanaminthe
L’Office national d’assurance-vieillesse (ONA) condamne, dans une note, le pillage et l’incendie de son bureau communal à Ouanaminthe, dans le département du Nord-Est, par des individus lourdement armés non encore identifiés, le lundi 29 janvier 2024. « Ces violences constituent de graves violations des droits des assurés et des pensionnés bénéficiaires des services de ce bureau, qui préparent et assurent leur avenir et leur vieillesse », fustige-t-il. Des protestations ont eu lieu le 29 janvier à Ouanaminthe contre le pouvoir en place.
Prise d’assaut de la prison civile de Cabaret par des bandits armés
Des bandits armés issus de la localité de Canaan ont attaqué et pris le contrôle du bâtiment de la prison civile de la commune de Cabaret le mardi 30 janvier 2024. Ils ont incendié ledit bâtiment après l’avoir pillé. Ce centre carcéral pour femmes avait été évacué l’année dernière, après une attaque en septembre 2022, suivie de l’évasion d’une centaine de détenues.

Manifestation contre le gouvernement à Pétion-Ville

Des militants issus de diverses organisations sociopolitiques ont manifesté dans plusieurs rues de la commune de Pétion-Ville, dans la matinée du mercredi 31 janvier 2024, contre le gouvernement d’Ariel Henry. La manifestation, qui devait aboutir au carrefour de l’aéroport, a été dispersée par des bombes lacrymogènes lancées par des agents de la Police nationale d’Haïti (PNH) à Delmas 73, devant l’ambassade du Canada.

Manifestation à Petit-Goâve : deux blessés par balle enregistrés

Deux blessés par balle ont été recensés le mercredi 31 janvier 2024 dans une manifestation à Petit-Goâve. Parmi les victimes figure un photojournaliste. Deux autres manifestants ont été blessés le mardi 30 janvier, ce qui porte à quatre le nombre de blessés par balle au cours de ces mobilisations dans la commune contre le gouvernement d’Ariel Henry.

L’école Sainte-Rose de Lima ferme ses portes jusqu’à nouvel ordre

L’institution Sainte-Rose de Lima annonce, dans un circulaire, la suspension de ses cours en présentiel. Cette décision a été prise le mercredi 31 janvier 2024 après qu’une balle perdue a heurté la fenêtre d’une des salles de classe de l’école. Cet établissement a fait savoir qu’elle travaillera à distance jusqu’à nouvel ordre.

Justice

L’ancien chef de gang Germine Joly, alias Yonyon, a plaidé coupable aux Etats-Unis
Germine Joly, alias Yonyon, ancien chef du gang « 400 mawozo », a plaidé coupable le mercredi 31 janvier 2024 devant un tribunal aux Etats-Unis des quatre douzaines d’accusations liées à la contrebande d’armes vers Haïti pour alimenter la violence de son groupe, a rapporté Miami Herald. L’ex-caïd a avoué sa participation à des activités de trafic d’armes de la Floride à Haïti et à l’enlèvement des 16 missionnaires étrangers dans le pays.

Port-de-Paix : Nord Est d’Haïti.
Un poste de péage établi par la mairie détruit par des manifestants
En colère contre des frais de passage allant de 100 gourdes (taxis moto) à 1000 gourdes (Camions) réclamés aux véhicules à moteur empruntant la route Port-de-Paix vers Saint Louis du Nord, des membres de la population ont soulevé jeté à la mer, le mercredi 31 janvier 2024, le poste de péage de Carénage établi par la mairie de Port-de-Paix. Les protestataires s’interrogeaient sur l’utilisation des fonds récoltés par le poste de péage depuis son inauguration par l’agent intérimaire de développement Josué Alusma le jeudi 5 octobre 2023.

Intervention internationale.

« Les États-Unis n’ont pas de parti pris sur le plan politique en Haïti », clame Éric Stromayer

À 7 jours du 7 février 2024, date de la transmission du pouvoir à des élus, selon les termes de l’accord du 21 décembre 2022, le contexte politique est survolté avec des appels à l’insurrection armée, à la désobéissance civile pour renverser le gouvernement en place. Il n’y a toujours pas d’initiatives concrètes pouvant permettre d’aboutir à un dégel de la crise haïtienne. Le chargé d’affaires américain, Eric Stromayer, continue de croire que des élections crédibles et équitables sont la seule voie pour la stabilité en Haïti.
« Depuis mon arrivée, il y a 18 mois, on redouble nos efforts à encourager la classe politique, les élites aussi bien les organisations de la société civile à s’engager avec le gouvernement de transition afin de pouvoir bouger le plus vite possible, avoir une feuille de route pour organiser les élections pour qu’on finisse avec cette transition qui doit être la dernière comme on dit », a déclaré le diplomate américain sur Magik 9, le mercredi 31 janvier 2024.
« Il n’est pas une question de solution des étrangers. Il doit avoir une solution haïtienne à la crise que la communauté internationale pourrait parrainer, assister. Cela peut se faire que lorsque les Haïtiens se mettent d’accord dans un contexte inclusif », soutient le chargé d’affaires américain.
À ceux qui aspirent à prendre le pouvoir sans passer par les élections, le chargé d’affaires américain rappelle que les prises de pouvoir dans ce contexte n’ont jamais apporté de solution pour le peuple haïtien. « Le changement de pouvoir sans passer par les élections ce n’est pas quelque chose que nous croyons qui peut aboutir à des solutions durables, cela a des impacts négatifs. Si on essaie de déstabiliser le pays par les armes ou autres, cela ne va pas améliorer la situation. La souffrance du peuple haïtien est réelle, les conséquences de l’insécurité ne sont plus à démontrer. Il faut qu’on y mette fin. La seule façon pour y arriver de façon stable et durable, c’est par les élections », insiste le diplomate.

Depuis la prise de pouvoir par le Premier ministre Henry, certains acteurs politiques et la société civile ne cessent de dénoncer un support des États Unis au pouvoir. Le chargé d’affaires américain a profité de son passage à l’émission Panel Magik pour contester de telles allégations. « Les États Unis restent le plus grand partenaire d’Haïti. On n’a pas de parti pris sur le plan politique. Notre partie consiste à essayer de soutenir le peuple haïtien. On soutient le peuple pour qu’il avance », a-t-il déclaré.
« Le gouvernement en place n’a jamais signalé qu’il veut rester au pouvoir. À maintes reprises, lorsqu’ils ont l’opportunité, les acteurs au pouvoir expriment leurs désirs d’aller aux élections », a-t-il renchéri.
Sur la question de savoir si les USA estiment que le Premier ministre Henry fait assez de concession pour arriver à un consensus minimal censé permettre la tenue des élections, Éric a évoqué les efforts des différents acteurs ces deux dernières années. « Je sais qu’il y a plusieurs reprises des engagements pris par différents acteurs, il y a les efforts du Groupe des Éminentes personnalités de la Caricom. Il y a les différents accords qui n’ont malheureusement pas abouti à une feuille de route. Évidemment on encourage le gouvernement en place à faire les concessions nécessaires pour qu’on puisse mettre fin à la tragédie du peuple haïtien », a-t-il soutenu.

Policiers Kenyans.

Les policiers kényans seront déployés en Haïti, annonce le président du Kenya
Le Kenya va poursuivre son plan visant à diriger la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti. Par Jean Daniel Sénat

Le Kenya va poursuivre son plan visant à diriger la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti. En dépit du fait qu’un tribunal de Nairobi a bloqué la semaine dernière le déploiement. C’est ce qu’a assuré le mardi 30 janvier le président kényan, William Ruto, à l’agence de presse Reuters.
Vendredi, l’incertitude planait sur l’avenir de cette mission après que le tribunal kényan a jugé qu’il serait inconstitutionnel de déployer des officiers à l’étranger à moins qu’un « accord de réciprocité » soit en place avec le gouvernement hôte.
Interrogé par Reuters, Ruto a déclaré qu’Haïti avait demandé de l’aide il y a des mois et qu’il espérait qu’une demande arriverait sous peu pour satisfaire les exigences du tribunal.
« Cette mission pourra avoir lieu dès la semaine prochaine, si tous les documents sont remplis entre le Kenya et Haïti dans la logique bilatérale suggérée par le tribunal », a déclaré Ruto en marge d’un sommet italo-africain à Rome.
Lorsqu’on lui a demandé si des discussions étaient en cours avec Haïti pour obtenir le document nécessaire, Ruto a répondu : « Absolument. Haïti a en fait écrit officiellement, pas aujourd’hui, mais il y a plusieurs mois ».
La force internationale, sollicitée par Haïti depuis octobre 2022, vise à lutter contre la violence endémique des gangs, qui a tué près de 5 000 personnes l’année dernière. Cette mission devrait être initialement financée par les États-Unis qui ont promis une enveloppe de 200 millions de dollars.
Le Kenya, qui participe depuis longtemps aux opérations internationales de maintien de la paix, s’est manifesté en juillet 2023 pour déployer 1 000 policiers en Haïti. Le président Ruto avait affirmé avoir pris cette décision par solidarité avec une nation sœur. Plus d’une dizaine de pays ont promis d’envoyer également des troupes dans le cadre de cette mission.
« La mission est en bonne voie. Elle constitue un appel plus important à l’humanité », a déclaré Ruto, soulignant qu’il s’agissait d’une opération policière plutôt que militaire.

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