Un article du journal "Le Nouvelliste"
Frères, Diègue, Marlique, Meyotte, les attaques armées se multiplient dans la commune de Pétion-Ville
Une situation de vive tension a régné dans plusieurs quartiers situés dans les hauteurs de Pétion-Ville pendant tout le week-end écoulé. L’étau de la terreur des gangs se resserre autour de Frères, Diègue, Marlique, Meyotte, Métivier et les zones avoisinantes. La population vit dans la peur, l’inquiétude et l’incertitude.
Le gang « Kraze baryè », dirigé par Vitel’Homme Innocent, continue d’allonger la liste de ses victimes au sein de la population civile. Neuf personnes ont été tuées et certaines brûlées, lundi 20 mars 2023 au carrefour de Cageau et Tunel à Pétion-Ville. Selon les témoignages d’une résidente du quartier, ce massacre est l’œuvre des hommes de Vitel’Homme en signe de représailles après la mort de deux de ses soldats durant le week-end écoulé. Fuyant la cruauté des bandits, les habitants abandonnent leurs maisons, a appris le journal.
Les habitants des quartiers dans les hauteurs de Pétion-Ville ne semblent pas être au bout de leurs peines. Les résidents de Diègue ont vécu l’enfer dans la soirée du samedi 18 mars 2023. Pendant plusieurs heures, des hommes lourdement armés ont semé la panique dans le quartier.
Des tirs incessants d’armes automatiques, des incendies, les appels de détresse fusent de partout. « Les hommes armés sont déterminés. Si la Police nationale d’Haïti n’intervient pas, les bandits peuvent nous tuer tous », alertent certains résidents dont les messages ont fait écho sur les réseaux sociaux.
Une résidente qui s’est confiée au journal dimanche dernier a raconté l’angoisse des habitants depuis quelques jours. « On connaît la puissance de feu des bandits et leur détermination. Le problème, c’est qu’on ne sent pas la réponse des forces de l’ordre. On est seuls. On se sent comme des proies jetées en pâture aux bandits », a balancé l’étudiante de 26 ans.
Un peu plus tôt dans la journée du samedi, la peur régnait à Marlique. Des hommes armés, dans les parages du quartier, ont menacé d’attaquer, encore une fois de plus, les résidents, a rapporté au journal Cossy Roosevelt, journaliste de carrière, résident de Marlique, victime dans l’attaque du vendredi 17 mars 2023.
Le quartier de Marlique était désert dans la matinée du samedi 18 mars 2023. Sans présence policière et dans la crainte d’une nouvelle attaque des hommes armés, les résidents ont pris refuge dans les quartiers avoisinants. « Ce matin j’étais sur place pour récupérer certains documents importants. Entre 10 heures et 11 heures 30, il y a eu l’alerte d’un éventuel retour des hommes qui ont terrorisé le quartier le vendredi 17 mars. De fait, certains résidents ont constaté des hommes en mouvement aux alentours de Marlique. Panique, tension, le quartier est complètement vide. Les habitants abandonnent leurs maisons pour échapper aux violences des bandits », a révélé au journal, dans l’après-midi du dimanche 19 mars, Cossy Roosevelt, journaliste de carrière, résident de Marlique.
Depuis quelque temps, Marlique reçoit beaucoup de menaces d’invasion de la part des bandits. Le vendredi 17 mars 2023, ils sont passés à l’action. Des hommes lourdement armés ont fait régner la terreur au sein de la population civile.
« Vers une heure de l’après-midi, vendredi, plusieurs dizaines d’hommes lourdement armés ont envahi le quartier. Ils ont tiré à tout va », a rapporté Cossy Roosevelt, soulignant que, parallèlement, les bandits ont incendié toutes les voitures stationnées le long de la route.
« De la première station de motocyclettes de Marlique jusqu’à la station d’essence près de l’hôtel appartenant à l’ex-mairesse de Pétion-Ville Clair Lydie Parent, un total de 19 voitures ont été incendiées et deux cadavres gisaient dans leur sang. Des sources concordantes on fait état d’une autre personne blessée par balle qui a eu le temps d’aller aux urgences. Les personnes tuées sont des résidents du quartier », a fait savoir le journaliste Cossy Roosevelt.
Le journaliste a confirmé pour Le Nouvelliste qu’il a été aussi victime dans l’attaque armée du vendredi. « Ma maison a été mitraillée, les vitres ont volé en éclats, plusieurs impacts de balles sont visibles sur la façade. Ma voiture a été incendiée. Le feu s’est propagé dans la maison. Ma femme suffoquait sous l’effet de colonnes de fumée. Il a fallu la mettre sous respiration artificielle avant d’aller à l’hôpital », a-t-il rapporté, soulignant que toutefois il n’était pas personnellement ciblé.
« Je suis victime au même titre que tous les résidents du quartier », a-t-il souligné, précisant que pour l’instant sa femme est hors de danger. « Ma femme est revenue de l’hôpital. Elle est saine et sauve », a-t-il fait savoir.
Selon les témoignages de Cossy Roosevelt, les hommes armés ont fait régner la terreur au sein de la population civile. « Dans une maison en face de la mienne, Pè Williams, un personnage de 82 ans, a été contraint de vider les lieux. Ensuite, les envahisseurs ont lancé des engins incendiaires à l’intérieur de la maison », a-t-il raconté.
Selon les premiers éléments d’informations disponibles sur l’attaque du vendredi écoulé, un homme identifié comme informateur de gangs armés aurait été tué puis brûlé vers midi par des membres de la population. En signe de représailles, des bandits ont attaqué la population civile.
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Blocage des routes, les intrants agricoles font défaut dans plusieurs parties du pays
Les agriculteurs haïtiens font face à une pénurie d’intrants au cours des deux dernières campagnes agricoles. Le prix de certains intrants a été triplé voire quadruplé au cours de cette courte période et les produits subventionnés ont du mal à atteindre les destinataires finaux. Des dizaines de prestataires de services ont plié bagages et des grossistes abandonnent leurs activités. Ainsi, dans certaines régions du pays, il faut plus de 12 000 gourdes pour s’acheter un sac d’engrais de 100 livres.
Le blocage des principales routes du pays a rendu difficile l’acheminement des intrants agricoles dans certaines zones agricoles et quasi impossible dans d’autres. Au cours de la dernière campagne d’hiver, la grande majorité des agriculteurs n’ont pas eu accès aux fertilisants chimiques. A Martissant et à proximité de Canaan, plusieurs camions transportant ces produits destinés à la production agricole ont été détournés. Certains fournisseurs ne prennent plus le risque de s’approvisionner tandis que d’autres sont obligés de composer avec les gangs ou certains agents des forces de l’ordre en vue d’un laisser passer.
Dans cette situation chaotique, ce sont les agriculteurs qui en paient le prix fort. Certains ont dû abandonner leurs parcelles. D’autres, plus attachés à leurs terres, sont obligés de faire sans les fertilisants chimiques au risque d’avoir une récolte moyenne, comparativement aux années antérieures. Ce qui accentuera de plus en plus l’inflation des principaux produits de consommation au niveau des marchés publics.
Intervenant sur les ondes de Radio Macaya le 14 mars dernier, le directeur départemental agricole du Sud, Marcelin Aubourg a déploré cette situation. Aux dires du dirigeant, les projets qui accompagnent les agriculteurs, notamment au cours de la campagne d’hiver, ont rencontré pas mal de difficultés. Dans son département, c’est environ 11 000 hectares qui étaient concernés par cette campagne.
Pour mettre en valeur les parcelles, il faut plus d’environ 66 000 sacs d’engrais. Pour la dernière campagne agricole, avec le support du Projet d’agriculture résiliente pour la sécurité alimentaire (PARSA), 7 800 sacs d’engrais ont été distribués, soit environ 12% du besoin. Une partie du reste a été achetée sur le marché et une grande partie du besoin n’a pas été comblée. Car, si certains planteurs peuvent s’en procurer à n’importe quel coût, les petits producteurs sont obligés soit d’abandonner leurs parcelles soit d’utiliser des fertilisants.
Ainsi, malgré les efforts de certains projets du ministère de l’Agriculture, l’on s’attend à une récolte en dessous et juste autour de la moyenne. Les producteurs du département du Centre, notamment ceux de Maïssade, ont attiré l’attention des décideurs sur le fait qu’il est difficile de s’approvisionner en intrants agricoles. Les fournisseurs, expliquent-ils, nécessitent des accompagnements de la part du gouvernement afin de faciliter l’approvisionnement en intrants. C’est aussi le cri du directeur départemental agricole du Sud qui affirme que l’insécurité est le plus grand frein à l’approvisionnement en intrants agricoles notamment en fertilisants dans le grand Sud.