Coopératives financières. Le scandale de 2003 en Haïti.

(actualisé le ) par Gérard

Article d’Alter-Presse relatant le scandale de 2003 qui a dépouillé 400000 personnes de leur argent.
P-au-P., 12 juil. 06 [AlterPresse] --- Le dossier des coopératives d’argent, détourné vers des destinations inconnues et ayant provoqué un scandale financier en Haïti en 2003, refait surface cette semaine avec le retour inopiné, sur le territoire national, de l’un des propriétaires de ces « alliances d’argent » considérées, par l’opinion publique, comme des combines pour capter les avoirs de nombreuses familles.
Comme annoncé depuis quelques semaines sur des affiches disséminées dans plusieurs quartiers de la capitale, David Chéry, propriétaire des coopératives « Cœurs Unis », revient en Haïti après environ trois ans d’absence sur le terrain. Des banderoles, portant la mention ‘’Bienvenue David Chéry’’ , ont été aperçues depuis juin 2006 à Port-au-Prince
Aucune explication, aucune information, ne sont fournies à date du côté de la Justice sur l’apparence de reprise de services par l’une des coopératives décriée et accusée de dilapider les fonds des sociétaires, constate l’agence en ligne AlterPresse.
A rappeler qu’en 2003, des descentes étaient régulièrement effectuées dans les coopératives par des policiers nationaux qui se sont, en maintes fois, emparés de matériels et d’autres biens, sans que les autorités de l’époque aient placé un mot sur ce qui était en cours. A l’époque, les oui dire laissaient croire que beaucoup de propriétaires de coopératives entretenaient des relations en haut lieu avec les autorités (y compris de la Police) du régime d’alors, à qui ils auraient donné continuellement de fortes sommes.
Alors qu’il était l’objet de poursuites, Chéry, qui a été emprisonné au moment de « l’affaire des coopératives » en 2003, annonce, sous forte escorte, être disposé à rembourser les fonds des sociétaires de sa coopérative.
Au cours d’une conférence de presse le 11 juillet, David Chéry, en personne, a promis de rembourser les sommes perdues dans un temps relativement court.
La coopérative « Cœurs Unis » recevra les dossiers de ses sociétaires plaignants entre la fin juillet et la fin du mois d’août 2006. Début septembre, « qui coïncidera avec la rentrée des classes », le processus de rétribution des montants devrait commencer à Cœurs Unis, avant sa réouverture proprement dite, indique David Chéry.
Cette nouvelle donne, dans le dossier des coopératives, survient à un moment où le silence est observé sur la suite accordée par l’Etat aux réclamations des sociétaires des différentes coopératives.
Va-t-on assister à la remise sur pied, sans crier gare, de ces alliances d’argent ? Quid des propriétaires des différentes coopératives qui se sont enfuis avec des avoirs estimés à 17 milliards de gourdes [NDLR : 1 dollar américain = environ 40.00 gourdes] ? Quid des réparations aux sociétaires ?
Toujours est-il que plusieurs associations de personnes victimes de la « banqueroute » des coopératives se demandent de quoi demain sera fait et de quelle manière elles rentreront en possession de leurs capitaux volés.
« Les autorités en place doivent prendre des mesures visant à contraindre les patrons des coopératives à restituer aux 400 000 sociétaires leurs avoirs, enfuis dans la pagaille des coopératives durant le dernier mandat de Jean Bertrand Aristide entre 2001 et 2003 », exige, dans une interview à AlterPresse, l’Association Nationale des femmes victimes des coopératives (ANFVC).
Dans cette interview accordée le mardi 27 juin 2006, la coordonnatrice de l’ANFVC, Margareth Fortuné, qualifiait de « gifle » aux sociétaires la présence des banderoles annonçant le retour du propriétaire de « Cœurs Unis ».
« Des membres influents du pouvoir en place seraient de connivence avec David Chéry dans le seul but de faire échec au projet de l’ANFVC, consistant à défendre les intérêts des sociétaires victimes », accuse Margareth Fortuné.
Elle dénonce, d’autre part, « les menaces venues des proches de l’actionnaire de Cœurs-unis », dont elle est serait l’objet.
« Quelques personnes sont venues me voir la semaine dernière en vue de planifier une rencontre entre David Chéry et moi. Mais avant de repartir, elles m’ont fait croire que David Chéry est bien enraciné dans le pouvoir et que toutes les actions menées à son encontre seraient vaines », relate-t-elle.
La coordonnatrice de l’ANFVC rappelle que diverses plaintes ont été déposées auprès de la justice contre les propriétaires des coopératives, dont David Chéry, accusés d’avoir détourné les capitaux d’une bonne partie de la population haïtienne.
Parallèlement, un cahier de doléances a été acheminé au Bureau du Premier Ministre, au ministère de la justice, au sénat de la République, à la chambre des députés, en vue d’accélérer le processus de restitution de l’argent perdu dans les coopératives.
L’ANFVC a déjà reçu 13 millions de gourdes du gouvernement de transition et 5 millions du régime de Jean Bertrand Aristide, confie Margareth Fortuné.
L’administration intérimaire de Boniface Alexandre / Gérard Latortue s’était engagée à débourser 100 millions de gourdes, à raison de 15 millions de gourdes par mois, au profit des sociétaires lésés.
A cette date, seulement 45 millions ont été effectivement octroyés, signale la coordonnatrice de l’ANFV.
Le dernier versement remonte au 15 juillet 2005, suite au début des opérations de remboursement par le gouvernement de transition à la date du 19 mai 2005, quand un premier montant de 15 millions de gourdes a été décaissé en faveur des sociétaires victimes regroupés au sein de différentes associations de victimes, dont l’ANFVC. [lf rc apr 12/07/2006 11 : 25]